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Conduite d'élevage porcin L'abaissement des consignes de températures est sans effet sur les performances zootechniques

Au Québec, les températures de consigne passent en général de 23°C à 18-20°C entre le début et la fin de la période d’engraissement. Des scientifiques québécois ont mené une enquête pour savoir s’il était possible de réduire de 4 à 5° en moyenne ces températures, sans pour autant affecter les performances des porcs. Les premiers résultats sont intéressants, notamment sur le niveau des émissions d’ammoniac, mais demandent à être répétés sur un plus grand nombre de sujets. Détails.

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« Les coûts de chauffage pour l’élevage des porcs
au Québec peuvent être réduits de plus de la moitié
en adoptant la stratégie ‘froide’ avec des consignes
de températures en phase d’engraissement
passant de 21,1 à 14,4°C. » (© Terre-net Média)

Que ce soit d’un côté ou de l’autre de l’océan Atlantique, les préoccupations des éleveurs porcins sont les mêmes : rester compétitifs dans un marché mondialisé, où il faut à la fois réduire ses coûts de production, produire une viande de qualité, être rentable, continuer d’investir dans son entreprise et répondre aux nouveaux enjeux posés par la société.

Au Québec, les scientifiques ont cherché à savoir s’il était possible de réduire les températures de consignes malgré le climat froid qui règne dans le pays.

De fait, « la hausse du prix des carburants, l’évolution des paramètres d’élevage, la volonté d’améliorer les performances zootechniques et le souci de protéger l’environnement justifient l’intérêt de revoir la stratégie de contrôle de la température ambiante en place depuis plusieurs décennies dans les élevages du Québec », détaillait Francis Pouliot, du Centre de développement du porc du Québec, en présentant les résultats d’une étude sur le sujet.

Abaisser les températures de consigne

En effet, au Québec, la température de consigne généralement utilisée en élevage s'inspire plus des recommandations françaises que celles utilisées dans l'Ouest canadien : « Dans l’ouest, les éleveurs débutent la phase engraissement (25 kg) à 21-22°C et la terminer autour de 15°C (115 kg), tandis qu’au Québec, cette température de consigne passe en général de 23°C à 20°C, ou 18°C pour la même période d’élevage et les mêmes poids » expliquait le Québécois, précisait par ailleurs que ces températures étaient « nettement supérieures aux températures critiques inférieures mentionnées par l’Ifip-Institut du porc ». 

Dans ce contexte, le Centre de développement du porc du Québec, en partenariat avec l’Institut de recherche et de développement en agroenvironnement de Québec a donc lancé une étude sur le sujet. Objectif : vérifier le bénéfice global d’un abaissement des températures de consigne.

Trois stratégies en comparaison

L’étude a donc comparé l'impact de trois stratégies de températures de consigne pour les porcs à l'engraissement sur les performances zootechniques, les émissions d'ammoniac et les besoins énergétiques en chauffage dans les conditions québécoises :

Deux essais de 11 semaines ont été réalisés dans 12 chambres à environnement contrôlé logeant chacune trois porcs à l'engraissement de 36 à 120 kg.

Le poids des porcs, la consommation d’eau et d’aliment ont été mesurés chaque semaine. La température ambiante, l'humidité relative, le taux de ventilation et les émissions de gaz ont été suivis en permanence.

Les performances zootechniques ne sont pas affectées

Ce qu’il faut retenir de l’étude

Les coûts de chauffage pour l’élevage des porcs au Québec peuvent être réduits de plus de la moitié en adoptant la stratégie ‘froide’ avec des consignes de températures en phase d’engraissement passant de 21,1 à 14,4°C.

« Par contre, avant de conclure sur la meilleure stratégie de température à adopter, une investigation devra être faite sur le coût de l’énergie requise pour faire fonctionner les ventilateurs étant donné qu’avec une stratégie ‘froide’ nécessite d’accroître tout au long de l’année le débit moyen de ventilation », résumait Francis Pouliot, du Centre de développement du porc du Québec.

Cette étude doit donc être complétée d’une étude globale économique. En effet, « dans cette étude exploratoire des écarts non significatifs, mais numériquement importants, ont été obtenus sur des caractères d’une grande importance économique tels que la conversion alimentaire, le rendement en viande et le rendement de carcasse ».

De plus, d’autres impacts sont également à prendre en compte dans le choix d’une stratégie de températures : l’amélioration de la qualité de l’air, la diminution de la pression d’infection, le bien-être des animaux et des travailleurs.

L’analyse des résultats ne met en évidence aucune « différence significative de performance ou de composition corporelle ». En effet, le Gmq, l’Imq et la CA n’ont pas été significativement affectés par la stratégie de températures. Dans le détail, le Gmq était de 1,08 kg/jour (chaud), 1,11 kg/jour (intermédiaire) et 1,06 kg/jour (froid).

Ces résultats viendraient donc confirmer d’autres informations antérieures issues d’une simulation menée en 2001 par Chénard et Lemay : ces derniers avançaient « que la température ambiante pouvait passer de 22°C pour des porcs de 25 kg à 15°C pour des porcs de 70 kg sans affecter les performances zootechniques ».

Seule variation logique: plus la température est élevée, plus la consommation d’eau des porcs est importante, avec respectivement 4,4 l/j (traitement froid), 5,2 l/j (traitement intermédiaire) et 5,5 l/j (traitement chaud).

25 % d’émissions d’ammoniac en moins

Le seul impact significatif est une réduction de 25 % des émissions d’ammoniac avec la stratégie intermédiaire par rapport à la stratégie chaude, à 0,05 g/jour/kg. Le besoin en chauffage annuel de la stratégie froide serait réduit de 59 % par rapport au traitement chaud.

Les performances zootechniques obtenues avec les stratégies froide et intermédiaire ont été très bonnes et non significativement différentes de celles de la stratégie chaude. « Par contre, aucune différence significative d’émission d’ammoniac n’a pu être observée entre les traitements. »

Seule la production de méthane a été affectée par le changement de consigne : le traitement « froid » a réduit de près de 42 % l’émission de méthane, par rapport au traitement « chaud ». « L’activité méthanogénique dans le lisier est associée à la température de ce dernier. Lorsque la température est diminuée, l’activité des microorganismes produisant le méthane l’est également. » Par contre, aucune différence n’a été relevée entre les traitements « intermédiaire » et « chaud ».

In fine, les besoins annuels en chauffage prévus pour les trois traitements représentent respectivement 8,1 MWh (chaud), 5,3 MWh (intermédiaire) et 3,3 MWh (froid).

Au niveau économique, cela représente respectivement 0,1487 €/porc, 0,0966 €/porc et 0,0595 €/porc, selon un tarif énergétique de 0,052 €/kWh.

Pour aller plus loin

Ifip-Institut du porc : www.itp.asso.fr.
Centre de développement du porc du Québec : http://www.cdpqinc.qc.ca

 

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